Dominique de Longevialle, un ancien BCEOM œuvrant maintenant à l’AFD, vient de participer avec notre Ministre du commerce extérieur Franck Riester, à l’inauguration du métro de Saint-Domingue.
BCEOM avait, il y a presque 20 ans, travaillé sur ce projet (visant à l’époque à la mise en œuvre d’un tramway) et y avait laissé quelques plumes. Mes souvenirs de la République Dominicaine, rédigés voici quelques années, mériteraient donc d’être repris car si la France a participé au financement de ce métro les impayés de l’époque ont dû être régularisés vis à vis de la Coface… à moins que la « comedia del arte » continue; dans le doute, je m’abstiendrai.
La République Dominicaine
« Vamos a pagar » Nous allons payer, voilà ce qui me vient en tête lorsque je pense à la République Dominicaine. Une grosse farce en fait.
Nous avions fait les études pour la mise en place d’un tramway dans la ville de Saint Domingue. Celles-ci étaient terminées depuis longtemps, mais toujours pas payées.
Je profitais de l’organisation par le MEDEF d’une visite dans ce pays pour me joindre à la délégation et retrouvais sur place Andrés Pizarro, en charge de cette affaire au sein de BCEOM. Comme nous avions souscrit une assurance pour risque d’impayés auprès de la Coface, nous pouvions compter sur l’appui du poste commercial auprès de l’ambassade de France. L’attaché commercial à Saint Domingue était actif et avait sérieusement pris notre dossier en main. Il s’arrangea pour que nous puissions rencontrer le Président de la République Dominicaine juste avant la réception officielle par celui-ci de la délégation du MEDEF.
Le Président nous reçut en son bureau en compagnie de son ministre des Finances, à qui il demanda des comptes. L’entretien ne dura guère et le Président le conclut par ce « Vamos a pagar » qui résonne toujours à mon l’oreille. Le ministre des Finances hocha plusieurs fois la tête en signe d’approbation. De la pure comedia del arte car nous n’avons jamais reçu le moindre paiement. Comme quoi parfois, la parole d’un Président ne vaut pas un peso.
La République Dominicaine est devenue depuis une destination phare pour le tourisme de masse, avec une profusion d’hôtels gigantesques du côté de Punta Cana. Sur la côte sud, nous nous étions rendus à La Romana à l’invitation du propriétaire d’un complexe résidentiel. Ce n’était pas un petit complexe. Il devait bien faire une vingtaine de km2 en bord de mer, avec golf, piscines, marina, restaurants, boutiques et même une piste d’aviation. Là nous étions entrés dans un autre monde.
On n’y entrait d’ailleurs pas facilement. Le domaine était en cours de développement et comprenait déjà un hôtel et une petite cinquantaine de villas joliment disposées dans le parc. La plus petite ne valait pas moins d’un million de dollars et les plus luxueuses atteignaient les cinq millions de dollars. Les clients étaient principalement américains, du nord ou du sud d’ailleurs.
Le propriétaire du complexe réfléchissait à la mise en place dans son domaine d’un système de transport en commun et, comme il avait entendu parler de nous pour le tramway, souhaitait notre avis.
A l’époque je ne compris pas sa demande, ne voyant pas très bien où était le problème. Aujourd’hui, après être allé faire un tour sur internet, je comprends mieux. On y voit très bien le complexe en bord de mer à la sortie est de La Romana : gigantesque. Des centaines de villas de style californien, avec piscine pour la plupart, alignées le long de parcours de golf.
Effectivement, pour éviter les nuisances futures, il n’était pas idiot de réfléchir à un système de transport propre au domaine. Je ne sais ce qu’a été la solution retenue, mais suis sidéré de voir le développement qu’a eu ce complexe en à peine dix ans.
Les multimillionnaires ne manquent donc pas sur la planète.
Jean-Louis SOULIER, avril 2022